Conseil haut de bilan, placement non garanti, petite souris

Jean Marc Fourré • 5 mai 2019
Une composition administrative récente nous donne à nouveau l’occasion  de parler du conseil haut de bilan, du placement non garanti … et d’une petite souris.

L’affaire paraît classique. Un conseiller en investissement financier (CIF) haut de gamme, attentif aux besoins de sa clientèle probablement très avertie en matière d’investissement, propose des titres non cotés émis par une société, société pour laquelle il a assuré également une prestation de conseil ‘‘haut de bilan’’.

Comme d’habitude pour une composition administrative, le détail n’est pas connu. Revenons rapidement sur les griefs retenus, par ordre d’apparition.

    Inadéquation du service rendu au client

Proposer des titres non cotés, donc peu liquides et présentant un niveau de risque assez élevé, à des clients dont le profil de risque est renseigné comme ‘‘prudent’’ ou ‘‘débutant’’ est effectivement déroutant.

Rappelons que le formalisme de l’adéquation du produit à l’investisseur a été renforcé par MIF 2, et que de telles incohérences – si elles se produisent – doivent être relevées lors du contrôle de deuxième niveau de l’activité de conseil.

    Information inadaptée, incomplète, non ‘‘claire, précise et suffisante’’

L’information communiquée aux investisseurs semble ici datée, incomplète quant à la présentation des risques encourus etc.

    Il appartient au conseiller de bien vérifier la qualité de l’information produite par le promoteur. Celle-ci doit être bien à jour (données financières récentes), pertinente (perspectives d’activité, projections chiffrées, scénarios et risques …), compréhensible et complète etc.

 

    Formalisme CIF insuffisant

L’AMF note et sanctionne l’absence des documents obligatoires de la relation client : document d’entrée en relation (DER), lettre de mission (LDM), rapports écrits de conseil (REC).

Inutile de revenir sur le triptyque DER / LDM / REC auquel viennent s’ajouter le rapport d’adéquation né de MIF 2 … et bien d’autres documents (coûts et charges ex ante …). Ces documents formalisent les étapes de la relation Client. Ils sont absolument obligatoires, quelle que soit l’ancienneté de la relation, la proximité avec l’investisseur, la nature ‘‘avertie’’ de la clientèle etc.

    Mise en œuvre d’une activité de placement non garanti

L’AMF estime dans cette affaire que le conseiller n’a pas mené une activité de conseil haut de bilan, qui inclurait

‘‘la recherche d’acquéreurs et souscripteurs potentiels auxquels il présentera(it) son projet entrepreneurial ou industriel, en amont de toute souscription ou acquisition. Ces acquéreurs et souscripteurs potentiels ont vocation à suivre de près l’évolution de la société et à s’investir dans la gestion de la société (actionnaires actifs, etc.).’’

Mais plutôt l’activité de placement non garanti, soit

‘‘la recherche, qu’elle soit directe ou indirecte, de souscripteurs ou d’acquéreurs’’ et dont on peut supposer qu’ils ‘‘n’ont pas vocation à intervenir au quotidien dans la gestion de la société’’.

    Absence d’identification et de gestion des conflits d’intérêts

L’AMF relève que le conseiller proposait un service de conseil haut de bilan à l’émetteur de titres, dont il assurait par ailleurs la présentation à des investisseurs, dans le cadre d’une relation de conseil en investissement, sans informer ces investisseurs de la nature des liens d’affaires existant entre le conseiller et l’émetteur. Le conflit d’intérêt n’était donc pas, ou pas assez, clairement identifié ni communiqué aux investisseurs.

Sur ces deux derniers points, le document AMF nous laisse sur notre faim.

Nous ne savons effectivement pas quelle formulation a pu être utilisée dans les mandats de conseil haut de bilan pour que l’AMF en déduise qu’il s’agissait, en pratique, de placement non garanti.

Nous ne savons pas non plus quelle information précise a été donnée aux investisseurs quant aux rémunérations perçues par le conseiller au titre du conseil haut de bilan, ni comment était rémunéré le conseil en investissement.

Nous ne savons pas, enfin et surtout, qu’elles ont été les engagements pris par le conseiller pour régulariser sa situation quant à son activité de haut de bilan / placement non garanti. Suffisait-il de modifier les termes du mandat signé avec l’émetteur et écarter des dénominations ambiguës ? S’agissait-il de modifier le processus de recherche des investisseurs ? A-t-il fallu modifier le mécanisme de rémunération du conseiller pour son activité de haut de bilan ?

Enfin, la mise en place préalable des éléments formels demandés par l’AMF quant à l’identification des situations de conflits d’intérêts potentiels et à l’information des investisseurs aurait-elle permis – à elle seule – d’écarter tout risque de confusion entre conseil haut de bilan et placement non garanti ?

Nous aurions bien aimé être une petite souris et assister aux échanges.

Pour en savoir plus :

Composition administrative – PNG et conseil HDB – Avril 2019

Ill. : Apodemus sylvaticus (mulot sylvestre). Pixabay, Pexels, 2019.
par Vincent Boisseau 3 mars 2025
Depuis le jeudi 27 février, l'outil O2S d'HARVEST est bloqué suite à une cyberattaque. L'information est officielle depuis le vendredi 28 février. A ce jour , lundi 3 mars, l'outil n'est pas rétabli. A ce jour, aucun élément n'indique qu'il y a eu fuite de données. CONSTATS & ANALYSES Suite à la cyberattaque d’HARVEST, il y a des obligations CNIL à faire en tant que vous Responsable des Traitements et HARVEST sous-traitant. D'autant qu'O2S contient une quantité astronomique de Données à Caractère Personnel sur les clients : adresse, mail, téléphone, RIB, patrimoine, CNI, peut-être données médicales...bref, c'est énorme. Donc il y a effectivement des choses à faire. Voici le lien vers la CNIL qui traite des violations de données personnelles : https://www.cnil.fr/fr/notifier-une-violation-de-donnees-personnelles En effet notre analyse est: qu’il y a eu une violation de données du fait d’un cas cité : perte de disponibilité , d’intégrité ou de confidentialité de données personnelles, de manière accidentelle ou illicite) En revanche on ne sait pas encore s’il y a eu fuite de données, LE DISPOSITIF d'HARVEST Voici les informations reçues par un CGP, en juillet 2024, sur le dispositif HARVEST : plutôt sérieux. "Sécurité physique : Les serveurs sont hébergés dans un Datacenter Interxion dans l’UE. Le Datacenter a de nombreuses certifications : ISO 14001:2004, ISO 27001 & ISO 22301, ISO 50001:2011, OHSAS 18001, ITIL V3 ,PCI-DSS, HDS (Hébergeur Données Santé). Les infrastructures sont monitorées 24h/24 et 7h/7. Les baies hébergeant les systèmes sont fermées à clé, seul le personnel habilité a accès aux baies : Notre sous-traitant (Waycom) pour la mise à disposition et la supervision des infrastructures d’hébergement travaillant pour le compte d’Harvest (hors baies privées dédiées dont l’accès est géré uniquement par Harvest) Les membres habilités de la DSI Harvest. Les grappes de disques ainsi que les alimentations sont redondées (ainsi que tous les éléments critiques physiques du Datacenter : réseaux internet, réseaux électriques, etc…). Sécurité logique : Les données de production sont accessibles uniquement par un nombre de personnes restreint, défini en accord avec le comité des risques d’Harvest. En aucun cas nos sous-traitants ont accès aux données applicatives. L’accès est basé sur une authentification : compte / mot de passe. Les droits et habilitations sont donnés selon le profil de l’utilisateur. Les flux sont chiffrés (HTTPS). Les données des applications répliquées en continue sur un serveur de secours local et sauvegardées sur un serveur de sauvegarde distant. Les opérations effectuées sur les serveurs sont journalisées. Les serveurs sont mis à jour régulièrement et possèdent un antivirus à jour. Des tests de vulnérabilité sont effectués périodiquement et donnent lieu, si nécessaire, à des plans de remédiation. Réglementaire : Dans le cadre de la réglementation européenne RGPD, un registre des traitements a été créé, il est maintenu par le DPO (Data Protection Officer) d’Harvest. Plan de continuité (PUPA), dans ce cadre Harvest : Dispose d’une procédure de gestion et d’escalade des incidents. A mis en place un comité des risques et est accompagné par un cabinet d’audit externe Activation de la cellule de crise en cas de problème majeurRéalise des évolutions régulières sur l’infrastructure matérielle et logicielle de ses environnements pour améliorer en permanence les performances et la sécurité " QUE FAUT IL FAIRE en interne ? La violation de données et la cyberattaque ne concernent pas VOS systèmes mais ceux d'un sous-traitant. Donc pas de panique. Quand on lit les instructions CNIL, dans cette configuration, il faut documenter la violation de données en interne. QUE FAUT IL FAIRE vis à vis de la CNIL? Là l'instruction est claire : il faut notifier l’incident à la CNIL dans les 72 heures (donc aujourd'hui pour ceux qui ne l'ont pas faite). Pour ce faire, la CNIL vous accompagne : compléter le document préparatoire (aide au remplissage) : https://www.cnil.fr/sites/cnil/files/2023-07/trame_des_notifications_de_violations_de_donnees_0.odt puis faite la notification en ligne : https://notifications.cnil.fr/notifications/ QUE FAUT IL FAIRE vis à vis de vos clients ? Ne faites rien pour le moment ! Il faut prévenir les clients si la fuite de données est avérée. En effet, la CNIL précise : en cas de doute sur l’incidence de la fuite de données personnelles concernant la vie privée des personnes concernées (c’est le cas à ce jour car nous ne savons pas s’il y a eu fuite ou non de données), notifiez à la CNIL qui vous indiquera s’il est nécessaire d’informer les personnes. Voilà Croisons les doigts pour que vous puissiez rapidement travailler et que les données des clients ne fuitent pas.!
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